Préface
Mostapha Bousmina*
Cette revue a la particularité de s’inscrire clairement dans l’ancrage qui fonde de façon forte l’identité et la vocation de notre Université, à savoir son appartenance à l’espace méditerranéen. Bien que tout en elle rappelle cette fibre identitaire, dont notamment le bleu et le vert constitutifs de son label visuel, il était nécessaire de donner jour à une tribune d’expression et de réflexion sur les divers sujets qui mettent en avant les signes et les empreintes de cette appartenance. Car il s’agit à travers cette publication de conduire une triple démarche académique et scientifique.
Premièrement, s’appliquer à revisiter le patrimoine commun aux sociétés et aux peuples méditerranéens, pour en rappeler les richesses et les enseignements que l’on peut en tirer dans divers domaines tels que l’écologie, l’architecture, l’art, le savoir-vivre… Nous en avons extrêmement besoin, pourrait-on dire, dans un monde de plus en plus malheureusement confronté à l’incertitude, en perte de traits d’authenticité et d’humanité, voire en manque de confiance en lui-même et en son avenir.
Deuxièmement, tâcher de repenser les analyses faites ici et là des réalités actuelles de la Méditerranée souvent brouillées par les assauts de la mondialisation, les inquiétudes résultant des changements climatiques, les intenses rivalités des grandes puissances, les cristallisations des ethnocentrismes qui se construisent, de part et d’autre de ses rives, stimulés par divers systèmes dogmatiques. Il y a à ce niveau en effet un fort besoin de compréhension et d’élucidation de la complexité de ces questions. Car loin de tout parti pris, la ligne éditoriale de la revue est avant tout soucieuse de développer un regard critique objectif, nourri d’éclairages pluridisciplinaires et complémentaires.
Troisièmement, s’atteler à prospecter, à partir de différents paradigmes thématiques, les pistes d’un avenir plus apaisé pour la région méditerranéenne, tenant compte de la dynamique de son histoire avec ses ambitions et ses obstacles, avec ses promesses et ses contradictions. Creuset d’importantes civilisations, de cultures et de savoirs aux dimensions humanistes universelles, cette région connaît pourtant, selon différents contextes, d’âpres difficultés à construire des conditions stables du vivre ensemble. L’écart y grandit entre ceux qui prônent le partage d’un même destin et ceux qui affichent une certaine tendance à l’hégémonie. La vocation de notre Université nous incline à surpasser cet antagonisme, en favorisant l’élaboration d’approches privilégiant le discernement contre l’aveuglement, l’espérance contre le désespoir, la conciliation raisonnée contre la tendance à la collusion…
En se proclamant de ces valeurs, la Cité et l’Université ne sont-elles pas parmi les plus beaux héritages que la Méditerranée nous a légués ? Le fait de rester fidèle à ce double héritage, les Méditerranéens sauront toujours (de génération en génération) dépasser les frontières réelles et imaginaires que leur imposent les aléas dues à de cruelles conjonctures.
Notre Université a été bâtie pour œuvrer à l’appropriation de cet esprit d’émancipation et de conquête sur soi et sur l’adversité qu’elle qu’en soit la source. Elle est de ce fait déterminée à accomplir la mission dévolue à cet esprit, et contribuer à faire de la Méditerranée un véritable laboratoire de création et d’innovation pour le développement durable. Cette revue veut, à sa manière, en être l’un des instruments les plus visibles et les plus rigoureux. Et à cet égard, je ne voudrais pas clore ce mot introductif sans remercier vivement son Rédacteur en chef, M. Abderrahman Tenkoul, et toute l’équipe d’enseignants et de techniciens d’avoir veillé à sa réalisation.
*President of the Euromed University of Fes, UEMF, Morocco.