INTRODUCTION ALTERNATIVES AFRICAINES

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INTRODUCTION

ABDERRAHMANE HADDAD*

Pourquoi Alternatives Africaines ?

L’Afrique a connu ces dernières décennies une évolution dynamique due à plusieurs facteurs. En plus des ressources naturelles substantielles, dont regorge le continent, la croissance démographique et le dynamisme de la population africaine constituent un autre point d’attrait pour l’Afrique. Avec une population de 1,3 milliards de personnes, dont à peu près la moitié à moins de 20 ans, et qui pourrait quadrupler d’ici l’an 2050, l’Afrique est devenue LE marché de demain. Cet essor ne pourrait qu’attirer les convoitises des puissances mondiales voire émergentes ces dernières décennies.

Mais c’est peut-être là que le bât blesse. L’Afrique a toujours été conçue et traitée comme un objet d’exploration, de convoitises, de colonisation et d’exploitation. Elle est un objet plutôt qu’un acteur. Dans certains esprits, c’est essentiellement les prairies, les réserves naturelles, les traditions ancestrales et la vie sauvage. Autant de stéréotypes et d’images figées qui ont façonné et rythmé la conscience collective sur le continent « noir ».

Mais l’Afrique fait face en revanche à d’énormes enjeux, complexes et interconnectés, sur fond de dynamiques politiques, ethniques, religieuses, tribales et culturelles. Ces enjeux, qui connaissent des imbrications locales, régionales et internationales, constituent une sérieuse menace à la paix et à la stabilité du continent et un obstacle à son développement économique et social. Parmi ces derniers, figure notamment la question des frontières, les conflits armés, instabilité politique et faiblesse des institutions, la menace terroriste et les groupes armés non étatiques, la criminalité transnationale, les ingérences et interventions étrangères, les flux migratoires, le changement climatique et la sécurité alimentaire, les épidémies, etc. En outre, l’Afrique est aussi appelée à répondre aux attentes légitimes de sa population en termes de démocratie, de libertés individuelles et collectives, d’égalité, de développement durable et de dignité.

La résolution de ces enjeux nécessite une approche holistique et multidimensionnelle ainsi qu’une coopération régionale et internationale. Pour comprendre l’Afrique, qui reste un continent fascinant mais fort complexe, et saisir l’importance et l’ampleur de ces enjeux, les études africaines constituent un champ académique multidisciplinaire qui se consacre à l’exploration et à la compréhension de divers aspects de l’Afrique, de sa culture, de son histoire, de ses sociétés, de ses langues, de son économie et de ses défis. Ce domaine qui englobe plusieurs disciplines, allant des sciences humaines et sociales et humaines aux sciences naturelles, jouent un rôle crucial dans la compréhension approfondie de l’Afrique, loin de tout déterminisme et des stéréotypes simplistes. Il contribue à éclairer les politiques, à sensibiliser le public aux véritables enjeux que connait l’Afrique et à contribuer aux efforts de développement durable sur le continent.

L’attrait que représente l’Afrique n’a pas échappé au Maroc, qui essaye de se positionner comme un acteur incontournable sur la scène africaine et qui estime qu’il y a une réelle alternative à la dynamique de conflits et de tensions, à travers sa stratégie de coopération, d’échanges et de partenariats Sud-Sud avec l’ensemble des pays africains. L’intérêt que porte le royaume pour le continent africain et sa stratégie africaine revêtent une dimension très importante. Le Maroc a depuis toujours mis en avant son identité africaine. Une identité très ancrée dans la conscience collective marocaine, grâce aux liens géographiques, historiques, civilisationnels, spirituels et culturels, etc., que le royaume entretient avec l’Afrique. En plus de la dimension politique et économique de sa politique étrangère, le Maroc a mis en avant l’importance qu’il accorde aux échanges scientifiques et culturels comme facteur de paix, de coopération et de développement. C’est dans cette optique que l’Université Euromed de Fès lance cette revue dont le nom est très révélateur, la Revue « Alternatives Africaines », pour démontrer le grand intérêt que portent le Maroc et notre Université pour l’Afrique et pour affirmer notre conviction qu’il existe une réelle alternative aux conflits, à la pauvreté et au sous-développement et un grand espoir dans un avenir meilleur.

Devant les multiples défis, contraintes et perspectives qui se dressent sur la tumultueuse trajectoire de l’Afrique vers un demain meilleur, le continent a plus que jamais besoin de concevoir son état et son devenir, de défricher de nouvelles pistes, d’élaborer et de mettre en œuvre des stratégies réfléchies, réalistes et réalisables. Tous les acteurs sont alors sont alors appelés à apporter leur grain de sel et de ramer dans la même direction. Il est temps de rendre l’Afrique un acteur qui forge son destin au lieu de le simplement subir.

Consacrer le premier numéro de la revue à la question de l’enseignement supérieur en Afrique témoigne de la conviction des responsables de l’UEMF de l’importance cruciale du rôle de l’Université et de la recherche scientifique dans tout processus de renaissance africaine et dans tout projet de développement économique, politique et social. C’est ainsi que ce premier numéro est riche en contributions faites par de belles plumes d’universitaires africains et étrangers qui ont mis en avant à la fois les défis et les perspectives de mise en place d’un cadre universitaire qui serait adapté aux contraintes propres au continent et propice aux velléités africaines de développement dans un monde plus équilibré, empreint des valeurs de partenariat, de collaboration et de reconnaissance mutuelle.

* Professeur à l’Université Euromed de Fès, Directeur de l’Institut des sciences juridiques et politiques